«Le Seigneur dit à Caïn :  « Où est ton frère ?»
Caïn répondit : «Je ne sais pas,  suis-je le gardien de mon frère ?»
Genèse 4,9-10

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Hospitalité-partage

Toute la bienveillance et la qualité d’une société, communauté, famille tiennent entre ces  deux interpellations: “où est ton frère?” et la réponse “suis-je le gardien de mon frère?”. Elles ouvrent l’espace de notre liberté soit pour rejeter l’autre, soit pour l’accueillir.

Notre Seigneur Jésus-Christ est venu recréer ce tissu fraternel blessé. En lui, nous sommes tous frères. Pour participer à cette fraternité, il ne nous laisse pas seulement un « commandement nouveau » mais une pratique du service du frère qui va jusqu’à lui laver les pieds : « Si donc je vous ai lavé les pieds, moi, le Seigneur et le Maître, vous devez aussi vous laver les pieds les uns aux autres » Jean 13,14. La parabole du « bon Samaritain » nous montre jusqu’où « se faire le prochain de l’autre » Luc 10,29-37 . Enfin la parabole du jugement dernier nous explique que dans cette communauté de frères, le Christ s’identifie aux plus petits que l’on rejette ou dont on prend soin: « En vérité chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits, qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » Matthieu 25,31-45. Dans l’hospitalité il y a un mystérieux échange.

Ce sont là les fondements d’une longue tradition monastique sur l’hospitalité. Les moines ont toujours été amenés à la pratiquer largement. Leur attitude envers les hôtes est avant tout dictée par l’esprit de foi.

 C’est  ainsi que Saint Benoit dans sa règle consacre l’imposant chapitre 53 sur l’hospitalité qui renvoie expressément aux exigences de la charité exigée par l’évangile. En voici quelques passages :

v.1 Tous les hôtes qui arrivent seront reçus comme le Christ, car lui-même doit dire un jour : “J’ai demandé l’hospitalité et vous m’avez reçu.” (Matthieu 25, 35)
v.2 A tous, on témoignera l’honneur qui leur est dû, surtout aux proches dans la foi et aux pèlerins.
v.12 L’Abbé versera de l’eau sur les mains des hôtes ; lui-même, avec la communauté entière, lavera les pieds à tous les hôtes. (Cf.Jean 13)
v.7 On adorera en eux le Christ même qu’on reçoit.
V.9 On leur témoignera toute l’humanité possible.
v.15 Ce sont aux pauvres et aux pèlerins surtout qu’on manifestera le plus d’attention parce que c’est particulièrement en leur personne que l’on reçoit le Christ.

A l’heure où les migrants de toutes cultures et conditions frappent à nos portes, pour nous moniales de Venière, retentit  plus que jamais la question « qu’as-tu fait de ton frère ? ». La règle de Saint Benoit nous invite à y répondre dans le concret de l’hospitalité, au quotidien.

 

Voici le témoignage de notre sœur hôtelière :

« Lorsque la Communauté est arrivée ici, à Venière, rapidement, une hôtellerie a été aménagée qui a fonctionné pendant plus de 40 ans. Reconstruite en 2009-2010 la capacité d’accueil a augmenté et nous permet de recevoir plus largement groupes et personnes individuelles qui viennent pour une retraite ainsi que nos familles, nos amis…
Notre accueil est aussi œcuménique. Par exemple, chaque année nous recevons l’équipe d’animation pastorale de l’Église protestante de Chalon pour la préparation de leur année.  Nous recevons des groupes de jeunes, catholiques ou protestants (je pense à ces jeunes venus de Suisse).
Il nous est arrivé de recevoir des groupes bouddhistes, des personnes musulmanes, ou d’autres encore ayant une quête d’ordre spirituel.
Parfois, nous rencontrons communautairement ces personnes ou ces groupes et c’est source d’enrichissement pour nous. Voilà pour l’essentiel de l’activité de l’hôtellerie.
Mais notre hospitalité ne s’arrête pas là, elle a un autre aspect. Celui qu’on pourrait appeler l’accueil de compassion. Une sœur est chargée de cette fonction et nous avons un beau local bien aménagé pour recevoir des personnes en situation de détresse, souvent sans domicile. Quand le local est déjà occupé, il arrive que l’hôtellerie participe aussi à ce service. Ces personnes apprécient de pouvoir se poser, refaire leurs forces dans un lieu où elles ne sont pas anonymes mais reçoivent aussi une certaine chaleur humaine, un accompagnement personnalisé. »

  • Pour aller plus loin, lire l’encyclique du pape François: “Tous frères”